Le 30 juin 2025, par Urbanitas.fr. Temps de lecture : cinq minutes.


L’Ukraine engage un retrait de la convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel

Géopolitique et convention internationale sur l’armement

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a signé ce 29 juin 2025 un décret prévoyant le retrait de l’Ukraine de la convention d’Ottawa de 1997, qui interdit la production et l’utilisation de mines antipersonnel. Cette décision, qualifiée de difficile mais nécessaire par Kiev, intervient après plus de trois ans d’invasion russe et l’usage massif de ces armes par Moscou, qui n’a jamais ratifié le traité.

Mines antipersonnel sur des terres agricoles proche du village de Vasylivka (oblast de Mykolaiv, Ukraine)
Mines antipersonnel sur des terres agricoles proche du village de Vasylivka (oblast de Mykolaiv, Ukraine) © Urbanitas, 2025

Le dimanche 29 juin 2025 marque un tournant dans la stratégie défensive ukrainienne. Volodymyr Zelensky a signé un décret présidentiel engageant le processus de retrait de son pays de la convention d’Ottawa, traité international de 1997 qui interdit la production et l’utilisation de mines antipersonnel. Cette décision intervient après plus de trois ans d’invasion russe et témoigne de l’évolution dramatique du conflit.

Le décret présidentiel met en application « la décision du conseil national de sécurité et de défense de l’Ukraine du 29 juin 2025, sur le retrait de l’Ukraine de la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction du 18 septembre 1997 ». Toutefois, le retrait effectif nécessite encore l’approbation du Parlement ukrainien, la Rada, puis la notification officielle à l’Organisation des Nations unies.

La convention d’Ottawa, signée par plus de 160 pays, prohibe ces armes particulièrement meurtrières. Les mines antipersonnel, conçues pour être enterrées ou dissimulées dans le sol, se déclenchent au contact ou à proximité d’une personne et peuvent causer la mort ou de graves mutilations. Leur dangerosité persiste bien au-delà des conflits, empêchant le retour des populations civiles dans les zones contaminées.

L’Ukraine avait ratifié ce traité en 2005, contrairement à la Russie qui n’en a jamais été signataire. Depuis l’invasion de février 2022, Moscou utilise massivement ces armes contre les forces ukrainiennes et les populations civiles. Cette asymétrie juridique place l’Ukraine dans une situation défavorable face à un adversaire qui ne respecte aucune restriction concernant ces armements.

Le ministère des affaires étrangères ukrainien justifie cette mesure comme « difficile » mais « nécessaire et proportionnée » au regard de « la priorité absolue qui est de défendre notre État contre l’agression brutale de la Russie ». Roman Kostenko, secrétaire de la commission parlementaire de la sécurité nationale, estime que « la réalité de la guerre exige depuis longtemps » cette décision. Selon lui, l’Ukraine « ne peut pas être prisonnière d’un environnement dans lequel l’ennemi n’a aucune restriction ».

Cette initiative ukrainienne s’inscrit dans un mouvement plus large. En mars 2024, les trois pays baltes – Lituanie, Lettonie, Estonie – ainsi que la Pologne avaient annoncé leur retrait de la convention d’Ottawa. Ces décisions, prises par des alliés proches de l’Ukraine, avaient suscité la réprobation d’organisations non gouvernementales et du Comité international de la Croix-Rouge, qui y voyait un « dangereux recul pour la protection des civils dans les conflits armés ».

Le contexte militaire justifie cette évolution stratégique. Les offensives russes se sont multipliées ces derniers mois dans l’Est et le Nord de l’Ukraine, nécessitant de nouveaux moyens défensifs. Fin 2024, le président américain sortant Joe Biden avait d’ailleurs autorisé la fourniture de mines antipersonnel à l’Ukraine pour freiner l’avancée des forces russes, préfigurant cette décision ukrainienne.

Un mouvement de retrait au sein des États baltes

Le Parlement letton avait voté, en avril 2025, en faveur de la sortie du pays de la convention internationale interdisant les mines antipersonnel. Cette décision historique s’inscrivait dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes depuis l’agression russe contre l’Ukraine en 2022, les pays limitrophes de la Russie redoutant de devenir à leur tour des cibles de Moscou.

Inara Murniece, présidente de la commission parlementaire des affaires étrangères, avait justifié cette décision dans un communiqué publié après le vote : « Le retrait de la convention d’Ottawa donnera à nos forces armées une marge de manœuvre en cas de menace militaire [et] leur permettra d’utiliser tous les moyens possibles pour défendre nos citoyens ». Le Parlement avait approuvé la sortie du traité à une large majorité, la mesure devant entrer en vigueur six mois après que la Lettonie en aurait officiellement informé les Nations unies.

En mars 2025, la Pologne et les trois États baltes - Lituanie, Lettonie, Estonie, suivis peu après par la Finlande, avaient déjà déclaré qu’ils s’apprêtaient à quitter la convention pour des raisons de sécurité. Ce retrait collectif avait laissé la Norvège comme le seul pays de l’OTAN frontalier de la Russie demeurant partie au traité. Début avril, Oslo avait déclaré qu’elle ne renoncerait pas à la convention et avait vivement critiqué la décision finlandaise.

Une convention efficace et indispensable à la protection des populations

La convention d’Ottawa, adoptée en 1997, interdit l’emploi, le stockage, la production et le transfert des mines antipersonnel. Elle a été ratifiée par plus de 160 pays, mais la Russie, les États-Unis et la Chine n’y ont jamais adhéré. Les mines terrestres antipersonnel (APL) sont des dispositifs explosifs, posés manuellement ou dispersés par des roquettes ou des obus, conçus pour dissuader une armée adverse ou une population d’accéder à certaines zones. Déclenchées au contact d’une personne, elles peuvent tuer ou causer de graves blessures, comme la perte d’un membre, et demeurent le plus souvent actives longtemps après un conflit, empêchant le retour des populations civiles.

Plusieurs organisations internationales ont déploré ces différentes annonces de retrait des États baltes. Le Comité international de la Croix-Rouge a notamment qualifié ces décisions de « dangereux recul pour la protection des civils dans les conflits armés », avertissant que « les États qui se retirent de ces traités risquent d’éroder des protections vitales et menacent des décennies d’efforts mondiaux visant à éradiquer ces armes inhumaines ».

Selon l’Observatoire des mines (Landmine and Cluster Munition Monitor), une initiative coordonnée d’ONG qui publie des rapports annuels, l’efficacité de la convention s’est pourtant révélée remarquable : le nombre de personnes tuées ou blessées par les mines et les restes explosifs de guerre est ainsi passé d’environ 25 500 en 1997, année d’adoption de la convention, à moins de 5800 en 2023. Des millions de mines ont en outre été détruites dans le monde, grâce à ces efforts internationaux coordonnés.


Urbanitas.fr


Aller plus loin : ressources complémentaires

Ressource : Landmine Monitor 2024 (the-monitor.org)

Ressource : Landmine and Cluster Munition Monitor (the-monitor.org)

Ressource : Mines antipersonnel : 22 % de victimes de plus en un an (hi.org)

Ressource : Mines et débris de guerre explosifs - Statistiques internationales (research.un.org)

Entités liées

Comité international de la Croix-Rouge, Convention d’Ottawa, droit international humanitaire, guerre en Ukraine, Lettonie, mines antipersonnel, Observatoire des mines, OTAN, pays baltes, restes explosifs de guerre, Russie, Ukraine, Volodymyr Zelensky, États baltes.


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